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« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
« ETAT DE L’ART » SUR LA NOTION DE COMPETENCE
Jean-François Lévy
Institut National de Recherche Pédagogique, Département TECNE
91 Rue Gabriel Péri, 92120 Montrouge France
Mél : levy@inrp.fr
INTRODUCTION
Dans le cadre de notre recherche coopérative sur les compétences que les enseignants doivent
mobiliser pour utiliser les TIC dans leurs activités, il nous a semblé nécessaire de faire le point
sur la notion même de compétence. En effet les changements importants entraînés par
l’introduction des technologies de l’information dans toutes les activités professionnelles
affectent également les outils dont disposent les analystes de l’action. Dresser un état de l’art sur
ces concepts de classement des « qualités » dont tout acteur doit faire preuve en situation de
travail nous aidera peut-être à avancer des hypothèses sur les spécificités que nous cherchons à
définir.
Après une définition succincte du concept de compétence et des éléments de critique de son
utilisation dans le domaine de la formation, nous ferons un bref rappel sur les théories de
l’activité humaine. Puis nous approfondirons les définitions du terme, ses composantes
(individuelle et collective) et les conditions de sa mise en oeuvre (notamment les ressources à
mobiliser) dans le cadre des activités professionnelles. Des notions voisines (qualification) et
complémentaires (performance, évaluation) seront ensuite abordées, ainsi que les différents
paramètres concernant l’acquisition des compétences.
Le métier d’enseignant (ou de formateur) possédant plusieurs spécificités, la définition de sa
professionnalité a donné lieu à plusieurs travaux que nous essayerons de lister, revenant ainsi sur
les compétences attendues (en général) de ces acteurs et les moyens de leur acquisition.
Enfin la partie concernant les compétences TIC proprement dites se présentera sous forme
d’hypothèses et de questions que nous espérons faire avancer collectivement dans le cadre de
notre recherche.
L’étude repose principalement sur des documents francophones récents.
LA NOTION DE COMPETENCE
Premières définitions
Une première approche de la définition du terme compétence est donnée par Gillet [Gillet 96] qui
classe ses différentes acceptions en :
1) sociale, 1.1) juridique, 1.2) maîtrise d’un domaine – entre autre professionnel –
d’activités par un individu,
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2) savante : compétence linguistique (Chomsky) ; il s’agit là du potentiel, du réalisable
(d’où son intérêt en éducation) s’opposant à la performance (le réalisé) (voir plus loin
pour performance) ; (cité aussi par Perrenoud [Perrenoud 97]).
La compétence se situe à l’intersection de 3 champs [Wittorski 98]
· parcours de socialisation et biographie de l’individu,
· expérience professionnelle,
· formation.
Pour Le Boterf [Le Boterf 94], la compétence « n’est pas encore un concept opératoire : c’est un
concept en voie de fabrication » ce qui signifie (en 1994) qu’il évolue dans le domaine de la
sociologie (notamment du travail). Cette évolution est liée à celle du monde du travail lui-même
(les tâches, les qualifications, etc. voir plus loin) ; le concept est-il stabilisé en 2000 ? Nous
pouvons penser que l’introduction massive des TIC, elles-mêmes en changement permanent
(Internet, etc.) ne contribue pas actuellement à arrêter durablement une définition du terme.
Toujours selon Le Boterf, la compétence se conçoit dans le cadre d’une relation bipolaire sujetenvironnement,
c’est une compétence de situation ; elle est inséparable de la motivation par le
fait qu’elle est liée à la « situation significative » construite par le sujet, cf. [Bruner 90].
Elargissement du champ théorique
L’opérationnalisation sur le terrain du concept de compétence donnant lieu à certaines difficultés,
des auteurs proposent de prendre en compte des éléments de la théorie de l’activité humaine en
complément des modèles classiques.
Dans leur étude sur les nouvelles compétences des acteurs de formation et les TIC, Belisle &
Linard [Belisle & Linard 96] se livrent à une critique de l’opérationnalisation du concept sur le
terrain (appelée « approche par les compétences »), qui donne lieu à des dérives. Les auteurs
donnent des exemples d’usages dans les domaines de la formation initiale et continue. En
formation initiale cette approche « en fait d’abord une technologie professionnelle pour les
formateurs… évoluant rapidement vers le prescriptif » et conduisant à des listes de
comportement. En « éducation initiale » la définition des compétences est davantage conçue
comme objet de recherche.
Des aspects contradictoires
Les auteurs soulignent cependant que l’approche par les compétences a des aspects positifs
certains, dont :
· La reconnaissance de savoir-faire implicites associés au travail et méconnus auparavant
· Une homogénéité dans les grilles d’analyse et les référentiels pour les formateurs
· Une tendance à favoriser le centrage sur l’apprenant
Mais elles relèvent aussi des points entrant en contradiction avec ces derniers, notamment :
· Le risque d’une normalisation exagérée qui aboutit à une fragmentation des éléments,
au détriment des dimensions de globalité et d’intégration (dont on verra l’importance
plus loin) ;
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· Le risque d’accorder trop d’importance aux performances, à la fonction d’évaluation
par quantification, au détriment de paramètres d’ordre qualitatif, plus aptes à évaluer
des capacités de synthèse, beaucoup plus générales ;
· Corrélativement, le risque d’accorder moins d’importance aux acquisitions de
connaissances d’ordre général (dont on verra plus loin leur importance) ;
· Le danger de se servir de cette notion pour pratiquer des énumérations statiques (les
« référentiels de compétences » des formations professionnelles).
Des théories insuffisantes
Belisle & Linard attribuent ces difficultés de « l’approche par les compétences » à une carence
théorique due à l’insuffisance des deux modèles les plus utilisés jusqu’à présent1 pour prendre en
compte un niveau de fonctionnement cognitif réflexif et synthétique nécessaire à la mise en
oeuvre de compétences véritables, à savoir :
· Le modèle comportementaliste de l’apprentissage, qui exclut les intentions, motivations
et situations des acteurs ;
· Le modèle informationnel, réduit au traitement rationnel de représentations
symboliques abstraites.
L’appui sur ces modèles « perpétuerait la confusion entre "traitement" d’informations et
"processus" de connaissance, entre "comportements d’agents" et "conduites d’acteurs" qui est à
l’origine de déconvenues répétées en éducation et en formation depuis les années soixante ».
Les auteurs proposent un éclairage de ces activités de formation par des concepts tirées des
théories de l’activité humaine intentionnelle. Cet éclairage permet de considérer des acteurs
associés aux mutations en cours et notamment aux processus d’évolution des TIC et des
compétences qui y sont associées.
Nous en rappelons brièvement ci-dessous les principaux éléments.
Rappel sur les théories de l’activité humaine (d’après [Belisle & Linard 96])
Ces théories prennent en compte tous les facteurs propres à toute action humaine consciente,
facteurs cognitifs et sociaux, de motivation, d’environnement. L’action humaine intentionnelle
est considérée comme une transformation volontaire, orientée et finalisée, exercée par un sujet
sur un objet en interaction réciproque. Belisle & Linard choisissent deux exemples de ces
théories, Leontiev pour un modèle hiérarchique « vertical » et Bruner pour un système
« séquentiel horizontal ».
Leontiev (1972), après Vygotsky (1978) propose un modèle de l’activité sujets – objets (matériels
ou symboliques) à trois niveaux :
1 Dans le domaine de la formation médiatisée pour cet article, mais nous pensons que cette hypothèse peut se
généraliser à toute activité professionnelle.
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Niveau Orienté vers Effectué par
Activité Intentions – buts communauté
Action Stratégies – planification Individu ou groupe
Opération Conditions de réalisation Humain ou machine, routinisé
Selon Bruner (1984), le cycle d’une action délibérée consiste à opérer une transformation d’un
état initial à un état final, selon les 5 phases suivantes :
1) séquentialisations temporelle des transformations d’un état initial en un état final
2) orientée par autofixation des buts par un sujet intentionnel
3) à partir de l’anticipation autonome et de la persistance volontaire d’un sujet
intentionnel
4) selon des stratégies sensibles au contexte et à l’évolution de l’intention initiale
(processus dynamique)
5) et pilotées par une régulation interactive.
L’action humaine devient, dans ce cadre théorique, auto-organisatrice, adaptative et évolutive et
donc plus proche des modèles biologiques du vivant.
Revenons maintenant à la compétence.
Munis de ces réserves en guise d’avertissement et de ce champ théorique élargi, nous pouvons
entrer dans une description plus détaillée, pour laquelle le schéma suivant nous servira de guide :
Savoir mobiliser
Compétence =
Savoir agir
=
Responsable et validé
savoir-intégrer
Des ressources
(connaissances,
capacités)
Pour obtenir des
résultats,
atteindre un but
Savoir-transférer
Dans un contexte professionnel
(D’après Le Boterf 1994)
La compétence se définit dans l’action (savoir agir)
C’est une compétence-en-acte, compétence-en-situation, qui se construit et fonctionne dans une
action finalisée, pour faire quelque chose. Ce lien fort à l’action se retrouvera partout, que ce soit
dans des concepts cognitifs (connaissances-en-actes de Vergnaud), dans la formation des
enseignants par la pratique, etc.
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« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
Ce savoir-agir est responsable et validé : la composante sociale
La compétence est reconnue par autrui ; c’est un construit social. Elle a une dimension collective
(même s’il s’agit de compétence individuelle). Elle a aussi une dimension socioculturelle :
l’habitus [Bourdieu], [Bruner], un système de valeurs socialement partagées.
La compétence est responsabilité (autre dimension sociale), c’est une composante de pouvoir, en
plus du savoir : il faut prendre et assumer des décisions, « avoir autorité pour… ».
Compétence et expertise : l’expert (personne en général compétente) est responsable,
contrairement au « système expert » (artificiel). L’expert est compétent parce qu’il domine très
rapidement les situations les plus courantes et parce qu’il est capable de coordonner rapidement
ses schèmes d’action [Bastien 97, cité dans Perrenoud 97].
La dimension individuelle :
Si Wittorski pense que la dimension sociale (collective) domine (« on ne se reconnaît pas soimême
compétent »), il semble cependant que l’on doive prendre en compte le « Sentiment de
Compétence » (SC) ou « Sentiment d’Efficacité Personnelle » (SEP) [P. Henri François 97],
notion relative à l’image de soi, liée à la motivation, au sens de son action. S’appuyant sur les
théories de Bandura, P.-Henri François développe cette notion de sentiment de compétence en
mettant en liaison compétence et motivation :
« Le sentiment de compétence est le résultat de l'auto-évaluation par l'individu de ses capacités à
mettre en oeuvre des comportements ou des ensembles de comportements identifiés comme
efficaces pour obtenir ou éviter certains résultats. Il joue un rôle important dans les processus de
motivation, dans la sélection et la régulation des conduites. ». [P. Henri François 97].
Cependant l’auteur porte un jugement sur le SEP et sur la théorie sociale cognitive de Bandura ; il
manquerait, d’après lui, des explication sur l’origine des motivations. Par ailleurs ces théories
seraient trop liées au contexte politique et économique capitaliste des Etats-Unis et ne
chercheraient pas à remettre en cause le fonctionnement social des entreprises et la structure
générale de l’organisation du travail.
Il semble donc qu’une composante de jugement personnel vienne renforcer les capacités à être
(ou à devenir) compétent, ce qui pourrait influencer également les acquisitions (de compétences).
Cette composante contenue dans les théories du sentiment de compétence nous intéresse sur deux
points :
· pour sa mise en perspective en regard avec la dimension collective de la reconnaissance
de la compétence
· dans la prise en compte de la motivation personnelle des acteurs, très présente dans la
mise en oeuvre des TIC par les enseignants, dans la mesure où ces activités sont encore
largement situées dans une démarche volontariste.
Mobiliser – intégrer – transférer
Il faut mettre en oeuvre, « mobiliser ses connaissances pour une action donnée » [Perrenoud 97].
Et plus largement que des connaissances, des ressources (voir ci-dessous). Etre capable d’actions
larges (intégrer, transférer), d’apprendre et de s’adapter.
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« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
La notion de transversalité est liée à la prise en compte ou non des contenus. Si les compétences
sont liées au contenu, ce sont des « ensemble stabilisés que l’on peut mettre en oeuvre sans
apprentissage nouveau » (de Montmollin, cité par Perrenoud, [Perrenoud 97]) ; « des répertoires
de comportements mieux maîtrisés par certains », d’où leur efficacité dans des situations données
(Lévy-Leboyer, cité par Perrenoud [Perrenoud 97]).
Si les compétences sont liées aux finalités et indépendantes du contenu, ce sont alors des
ensembles de capacités pour agir, pour résoudre des problèmes. Par exemple, la classification de
Katz (cité par [Guir 96]) concernant « le gestionnaire efficace », mais ayant valeur de
transversalité évidente :
· Compétence conceptuelle (analyser, comprendre, agir de manière systématique) ;
· Compétence technique (méthodes, processus, procédures, techniques d’une spécialité) ;
· Compétence humaine (dans les relations intra et interpersonnelles).
Des ressources
Quelles sont les ressources à mobiliser pour mettre en oeuvre les compétences ?
C’est en gros tout ce que l’on sait (de manière théorique) et tout ce que l’on sait faire (de façon
pratique). Mais la définition d’un tel ensemble de notions fait appel à des cadres théoriques
différents (psychologie cognitive, psychologie du travail, ergonomie) et ne fait pas l’unanimité.
Tentons une ébauche de revue.
Quelques définitions
En psychologie cognitive, nous trouvons deux tendances dominantes :
· Connaissances déclaratives et procédurales bien séparées [Richard 90]
· Concepts-en-actes et connaissances-en-actes [Vergnaud 96], remettant en cause la
partition « dure » entre le déclaratif et le procédural ; de plus, le lien entre les deux est
assuré par la notion de schème (voir plus bas).
En psychologie du travail, Wittorski [Wittorski 98] définit des termes pour les utiliser dans la
construction des compétences :
· savoir : énoncé communicable, jugé socialement vrai
· connaissance : savoir intériorisé ; résultat du processus d’intériorisation individuel ou
collectif des savoirs
· capacité : compétence décontextualisée, disposition à agir (transversale), potentialité
d’action
· professionnalité : ensemble des compétences reconnues socialement comme
caractérisant une profession
Altet [Paquay, Altet & coll. 98] reprend la définition des termes information,
communication et savoir à propos des enseignants professionnels :
· L’information est extérieure au sujet et d’ordre social ;
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· La connaissance est intégrée au sujet et d’ordre personnel ;
· Le savoir : ce qui est acquis, construit , élaboré par l’étude ou l’expérience [Beillerot
89, 94] ; il se situe entre les deux pôles, se construit dans l’interaction informationconnaissance,
entre sujet et environnement dans et par la médiation.
La comparaison de ces définitionsfait ressortir l’accord général sur le terme connaissance
(d’ordre personnel), le remplacement du savoir par l’information et l’aspect dynamique et actif de
la dernière notion de savoir. De plus, la partition entre des connaissances d’ordre théorique et des
savoir-faire d’ordre pratique n’est jamais remise en cause, même si elle est quelque peu atténuée
par le concept de schème (voir ci-dessous).
Perrenoud [Perrenoud 97] distingue entre savoir-faire (savoir comment faire) et savoir y faire
(savoir procéder de manière pratique). Savoir-faire n’est pas toujours ou tout de suite assimilable
à une connaissance procédurale. En plus des connaissances déclaratives et procédurales,
Perrenoud ajoute les connaissances « conditionnelles » pour préciser les conditions de validité
des connaissances procédurales.
Le Boterf, dans son ouvrage sur les compétences [Le Boterf 94], définit ainsi les ressources à
mobiliser :
· Savoirs théoriques : compréhension d’un phénomène, « savoir que… », concepts,
schémas assimilateurs, schèmes (voir ci-dessous) ;
· Savoirs procéduraux : « comment s’y prendre pour… » méthodes, modes opératoires ;
· Savoir-faire procéduraux (connaissances procédurales) : savoir vraiment le faire (s’être
entraîné…) ;
· Savoir-faire expérientiels : savoirs issus de l’action, leçons de l’expérience pratique
(boucle de retour) ;
· Savoir-faire sociaux : « savoir-être », habitus (Bourdieu) qui généralise la notion de
schème, socialisation professionnelle. Perrenoud [Paquay, Altet & coll. 98] souligne
l’importance de l’habitus.
Cette liste ressort d’un « mode de manifestation des savoirs » qui ne peut se déduire, d’après cet
auteur, d’une transparence totale des processus cognitifs, jugée prétentieuse.
Les schèmes
« organisation invariante de la conduite pour une classe de situations données »
[Vergnaud 96]. D’après cet auteur, le schème se compose de :
· buts et sous-buts, séquences intermédiaires ;
· règles d’action (par exemple de type « si condition alors action »), de prise
d’information et de contrôle ;
· invariants opératoires, c’est-à-dire des représentations de la structure conceptuelle de la
situation, celle mobilisée dans l’action par l’opérateur, celle qui organise son activité,
« concepts-en-actes » et « théorèmes-en-actes » ;
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· inférences en situation permettant de repérer notamment les situations de travail à
prescription faible.
Toujours selon cet auteur, le concept de schème permet de faire le lien entre les conceptions
et les compétences et évite ainsi une conception schizophrénique des processus cognitifs,
distinguant sans les relier entre elles des connaissances déclaratives et procédurales (auxquelles
sont souvent corrélés respectivement les savoirs et les savoir-faire, cf. [Richard 90]).
Vergnaud définit également les concepts-en-actes (objets et prédicats sous-jacents à
l’action), les théorèmes-en-actes (propositions tenues pour vraies sur le réel) et les champs
conceptuels (ensemble de situations dont le traitement implique des schèmes et des concepts en
étroite connexion, ensemble de concepts et de théorèmes en actes).
Les schèmes d’action dans une perspective d’action instrumentée
Les schèmes sont inséparables de l’action et notre domaine de préoccupations se situe dans
l’utilisation de dispositifs, ce qui rend le travail de Rabardel [Rabardel 95] sur l’action
instrumentée particulièrement intéressant.
Rabardel définit les situations d’activités instrumentées, à partir de la triade Sujet – Instrument –
Objet (sur lequel porte l’action, très général). L’instrument est le médiateur entre le sujet et
l’objet de son action.
Le dispositif physique est un artefact, l’instrument est l’ensemble artefact + schème d’utilisation.
L’instrument est à la fois le moyen de l’action transformatrice (dans une médiation pragmatique
du sujet vers l’objet) et ce qui permet la connaissance de l’objet (dans une médiation épistémique
de l’objet vers le sujet).
L’instrument est opératif, c’est-à-dire qu’il prend en charge une partie de la tâche. D’où l’aspect
de conservation et de réutilisation dans des tâches similaires ; l’instrument est un moyen de
capitalisation de l’expérience accumulée et donc de connaissances, extérieur à l’homme.
Schème d’usage et schèmes d’action instrumentée
· Schème d’usage : relatif aux tâches secondes, c’est-à-dire à la gestion de des
caractéristiques et propriétés particulières de l’artefact ;
· schème d’action instrumentée : acte global de transformation sur l’objet, tâches
premières ; il peut être collectif, relatif à une action collective et des buts communs.
Il y a une hiérarchie entre les deux : des ensembles de schèmes d’usage intériorisés, routinisés,
deviennent des schème d’action instrumentée. Cette hiérarchie fonctionne à plusieurs niveaux
d’emboîtement ; par exemple, l’intériorisation de l’opération de changement de vitesse sera
réalisée lorsque ses composantes (débrayer, passer au point mort, positionner sur la vitesse
suivante, embrayer) seront routinisées ; l’opération de dépassement (dans laquelle on trouve
l’opération précédente en tant qu’élément) nécessitera la même construction à partir d’éléments
de base.
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…Dans un contexte professionnel
Le contexte professionnel en évolution (surtout depuis les années 80) a fait glisser de la notion de
qualification (relativement à un taylorisme dominant) à celle de compétence : des tâches
parcellisées, peu adaptables et peu évolutives ont cédé la place à d’autres, ayant des exigences de
plus grande de flexibilité et partant, une demande accrue de compétences : grâce/à cause de
l’automatisation, on tend ainsi vers un élargissement des possibilités des acteurs, une plus grande
adaptabilité, des capacité à effectuer des transferts, toutes qualités en relation directe avec avec ce
terme.
Perrenoud [Perrenoud 97] définit également la compétence professionnelle comme « la capacité
d’agir efficacement dans un type défini de situation ».
Autres définitions autour des compétences
Leplat [Leplat 91, cité dans Pastré 98] définit la compétence comme « système de connaissances
qui permettra d’engendrer l’activité répondant aux exigence des tâches d’une certaine classe ».
Puis il complète [Leplat 95] par la notion de compétences incorporées (à l’action), notion qui
insiste sur la dimension de finalité, pour et par l’action.
Compétence, qualification et performance
« Capacité pour un individu à remplir une tâche professionnelle selon certains standards de
performance, définis et évalués dans des conditions spécifiées, à partir d’une méthode de
décomposition des fonctions et des tâches en niveaux et en unités de comportements observables,
assorties de critères précis de performance » [Belisle & Linard 96].
Cette définition de la compétence entraîne directement la notion de performance : pour définir
cette dernière, il faut référer la compétence à une échelle de valeurs. On débouche ainsi sur la
notion d’évaluation.
Les critères d’évaluation peuvent être classés en 2 catégories [Le Boterf 94] :
· jugement d’efficacité, d‘utilité ou de conformité
· jugement esthétique, « de beauté » relatifs aux qualités spécifiques du sujet, créativité,
etc.
La définition des critères dépend aussi du moment de l’évaluation [Le Boterf 94] :
· Avant l’action (compétence technique, juridique), lié à une potentialité
· Pendant l’action (compétence tactique, celle du politicien qui marque des points lors
d’un débat)
· Après l’action (compétence esthétique, éthique) une oeuvre d’art, une interprétation
musicale, la réussite d’une formation.
L’évaluation elle-même peut s’effectuer [Le Boterf 98] :
· par les performances
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« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
· par la concordance (avec la compétence requise, c’est-à-dire les règles), jugement par
l’expert, sur des critères et non sur une conformité à un moule comportemental ;
· par la singularité, subjectivité de l’individu qui réalise avec ses propres schèmes. La
singularité s’exprime par le récit (écrit) de la réalisation par l’acteur, en vue de sa
propre évaluation.
Dans le système éducatif, Perrenoud [Perrenoud 97] met l’accent sur l’évaluation formative ; il
semble que la pertinence (et la réussite) de l’évaluation soit davantage liée au contexte global :
respect du contrat didactique par l’apprenant, participation effective à des activités complexes,
etc., ce qui n’empêche évidemment pas d’évaluer la « réussite » de la tâche et a fortiori sa
« compréhension ».
« Fonctionnement » de la compétence : comment s’exerce-t-elle ?
Le Boterf [Le Boterf 94] envisage le fonctionnement de la compétence dans une approche
systémique, dans laquelle il examine tour à tour les conditions de réalisation, les moyens ou
ressources à disposition, les critères de performance et les critères de réussite (plus qualitatif). En
voici les principales étapes :
· Elaboration de représentations opératoires : les représentation sont un « pont », un
médiateur entre les ressources à mobiliser et les activités à réaliser.
Les représentations sont des représentations « pour agir » ; elles sont incomplètes « l’image
opérative » d’Ochanine est lacunaire. Elles nécessitent une construction par une formationacquisition
; cf. [Richard 90]
La compétence suppose-t-elle toujours la représentation ? Non [Le Boterf 94], on n’agit
pas toujours en fonction d’une représentation explicite (par exemple « l’intuition » de
l’expert, un fonctionnement par réflexe dans certaines situations connues et rapidement
identifiées).
· Prise en compte de l’image de soi, situation des tâches dans une échelle de
valorisation/dévalorisation (cf. P.-H. François, déjà cité).
· Activation des savoirs mémorisés : l’ensemble des ressources mobilisables à bon escient,
supposées acquises au préalable (voir plus haut).
· Mise en oeuvre de savoir-faire cognitifs : opérations d’inférences, etc. par tous les moyens
classiques :
L’induction : généraliser à partir d’observations réalisées ;
L’abstraction réfléchissante (Piaget 1977) : porte sur des schémas de pensée mis en
oeuvre par le sujet. réfléchissement = aboutit à la conceptualisation et réflexion
construit de nouvelles formes, réorganise les schémas ;
La déduction : produit de nouvelles connaissances à partir de prémisses,
particularisation ;
L’abduction : recherche de nouvelles similitudes (portant sur des champs abstraits, des
relations abstraites) dans des champs différents
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« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
La transduction : construire un objet possible à partir d’informations portant sur la
réalité, le possible est considéré comme faisant partir du réel à étudier ;
La métaphore et l’analogie : utiles pour la transduction et abduction.
La mise en oeuvre de savoir-faire cognitifs comprend également l’activation des schèmes.
· Méta-connaissances et méta-cognition :
Connaissances du sujet sur ses propres connaissances, ses savoirs, les démarches qu’il met en
oeuvre, sur sa façon de s’y prendre pour…
3 niveaux [Le Boterf 94] :
Savoir-faire action/perception apprendre en faisant
Décrire ce qu’on sait faire Réfléchissement
méta connaissance
apprentissage par transfert
Décrire comment on s’y prend
pour décrire ce qu’on sait faire
méta cognition apprendre à apprendre
Résultats : des pratiques ou conduites professionnelles mises en oeuvre
Référence aux Systèmes de Représentation et de traitement [Hoc 87] et [Richard 90] :
· Pratiques d’exécution, automatisées (routinières) ou non ;
· Pratiques de résolution de problème : soit particulariser un schéma général, soit
élaborer une nouvelle procédure par essais et erreurs ; élaboration de stratégies,
classifier les problèmes (possibilités de l’expert).
Cette caractérisation des pratiques ne dépend pas de la situation objective, mais de la
relation opérateur-situation : une même situation peut être routinière pour un opérateur qui la
connaît et la pratique depuis longtemps et se présenter comme un problème à résoudre pour un
acteur qui la rencontre pour la première fois. Par exemple, la réalisation d’un « copier-coller » en
traitement de texte constitue un problème en soi lorsque le sujet y est confronté pour la première
fois (trouver les boutons pour exécuter la séquence sélection – copie – déplacement du curseur –
insertion), puis se routinise par la répétition, la correction d’erreurs, etc.
Ces pratiques seront jugées exercées avec compétence ou non [Le Boterf 94] . Les performances
sont les résultats observables des pratiques professionnelles, qui peuvent être mesurés.
Compétence individuelle et collective
Dès qu’il y a organisation (entreprise), se pose la question de la compétence collective. La
compétence d’une équipe est plus grande que la somme des compétences des individus.
Exemple : des équipes médicales pluridisciplinaires.
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« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
Compétence collective des équipes
Une compétence collective est caractérisée par les éléments suivants [Le Boterf 94] :
· une image opérative commune que chaque opérateur possède
· un code et un langage communs, propres à l’équipe (non exportable), un savoir social
commun
· un savoir-coopérer, mise en commun des possibilités pour résoudre les problèmes par la
discussion au sein de l’équipe
· un savoir apprendre de l’expérience.
Il existe plusieurs types d’équipes (parallèle sportif : base-ball, football, double tennis).
Elaboration de la compétence d’équipe : par la production d’une règle non écrite de
fonctionnement et de coopération par le groupe lui-même, en plus de règles écrites à l’extérieur
(De Terssac, cité dans Le Boterf 94]. Toutes ces règles sont respectées, intégration des
compétences individuelles mises en commun et construction d’une dépendance cognitive entre
les acteurs. Pratique et entraînement, formation-action s’ajoutent à ces principes.
Réseaux de compétences organisés en maillage [Le Boterf 94]
L’entreprise est considérée comme « système de compétences » avec distribution du pouvoir et
importance des interfaces entre les équipes.
Liaisons entre innovation et réseaux de compétences : mise en commun, utilisation d’une base de
connaissances et d’une base d’expérience.
En conclusion de son ouvrage, Le Boterf [Le Boterf 94] souligne la nécessité de prendre en
compte :
· Le degré de complexité des problèmes à traiter,
· Le type de combinatoire des savoirs à mobiliser : les types de compétences sont définis
à partir des types de problèmes à résoudre,
· Le champ d’application particulier des savoirs : il faut spécifier les domaines
professionnels,
· Le niveau de la compétence du sujet :débutant, maîtrise professionnelle, expert
La mise en oeuvre des compétences dépend du sujet et de l’environnement, des conditions et
situations de travail.
L’auteur ajoute la notion de fiabilité humaine, c’est-à-dire la probabilité que les acteurs
accomplissent l’action prescrite dans des conditions acceptables. Cette notion probabiliste inclut
la gestion des aléas et dysfonctionnements à tous les niveaux de l’organisation dans laquelle
fonctionnent les acteurs.
Dans le cas de notre étude, cette approche multifactorielle ne va pas faciliter la tâche car
introduire les TIC semble représenter pour le moment l’ajout d’un ensemble d’instruments et de
pratiques non stabilisés (même à l’extérieur du domaine dans lequel on l’introduit).
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« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
CONSTRUCTION/ACQUISITION DES COMPETENCES
Quelles sont les situations et opérations permettant de construire (et de faire construire) les
compétences ? Cette question est au coeur de nos préoccupations, à tous les niveaux de formation
et d’enseignement.
Cadres théoriques de l’apprentissage
On retrouve les deux modèles antagonistes cités par Belisle & Linard [Belisle & Linard 96], à
savoir le modèle comportementaliste (objectifs, conduites observables) et le modèle cognitiviste
(traitement de l’information) ainsi que les modèles plus larges de l’activité humaine (notamment
les russes Vygotski, Ochanine, Leontiev, et Bruner).
Les situations sociales de construction des compétences
Wittorksi propose 5 voies de construction (par les acteurs formateurs), liées à 5 situations sociales
d’acquisition-formation :
· formation sur le tas, par l’action seule (sans réflexion institutionnellement
organisée) ; formation de routines figées, peu adaptables, résiste aux changements ;
· formation alternée, action et réflexion « compétences maîtrisées », davantage
transférables ;
· analyse de pratiques, réflexion rétrospective sur l’action ;
· anticipation sur les pratiques, réflexion anticipative sur l’action ;
· acquisition de savoirs théoriques, supposés s’investir dans des pratiques futures
(situation classique de formation initiale dans le système éducatif actuel).
Les formations de type 2, 3 et 4 semblent avoir la faveur des théoriciens de la formation
d’enseignants (voir plus loin [Paquay, Altet & coll. 98]).
Les composantes de la construction des compétences
Wittorski caractérise la construction des compétences (mais pas leur contenu) par cinq
composantes : cognitive, culturelle, affective, sociale et praxéologique, articulées sur trois
niveaux : niveau de l’individu ou du groupe producteur/auteur, environnement social immédiat,
organisation (sociétal).
· composante cognitive : niveau micro, individu ; représentations cognitives, représentations
de la situation par l’acteur ;
· composante affective : moteur de la compétence ; image de soi, investissement affectif,
motivation ;
· composante sociale : reconnaissance par l’environnement immédiat, pari sur la
reconnaissance à venir ;
· composante culturelle :influence de la culture sur les compétences
· composante praxéologique : le produit (observable) et son évaluation sociale.
14
« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
Ces composantes impliquent des outils et des modèles puisant dans des cadres théoriques
différents.
Construction cognitive des compétences
Du point de vue cognitif, les compétences se construisent notamment par l’acquisition de
schèmes et la construction de représentations chez le sujet (pertinentes, « pour l’action»,
[Rabardel, Weill-Fassina & Dubois 93]).
Construire des compétences est inséparable de la démarche de former des schèmes de
mobilisation des connaissances à bon escient [Perrenoud 97], en temps réel pour une action
efficace, et donc par la pratique, l’entraînement.
Comment s’entraîner pour former les compétences ? ce n’est pas seulement par l’acquisition de
« savoirs locaux » complétant des savoirs généraux [Perrenoud 97].
Pastré [Pastré 98] donne plusieurs spécifications à la notion de construction des compétences :
1. Une compétence se construit à partir d’une situation prototypique ; il est difficile de
repérer ce qui différencie la conceptualisation de la simple utilisation de règle d’action ;
2. La compétence se développe par le fait que l’opérateur prend en compte des conditions
de plus en plus variées qui s’éloignent de la situation prototypique. Il faut distinguer le
niveau des règles d’action, en fonction des classes de situations et le niveau des
concepts pragmatiques ou scientifiques, qui sert d’organisateur de l’activité ;
3. La compétence se désincorpore [Leplat 95] : prise de distance par rapport aux
situations ; explicitation des concepts mobilisés ; être compétent revient à savoir faire et
à savoir comprendre ce que l’on fait ; savoir appliquer les règles ne suffit pas.
Par exemple, dans l’apprentissage à l’utilisation du traitement de texte, utiliser des
« modes opératoires » sous forme de règles rigides ne permet pas de gérer les aléas
inévitables… C’est ainsi que faute d’avoir suffisamment compris et intégré les
opérations de « copier-coller » qui leur aurait permis de rattraper un aléa ou une erreur,
des élèves débutants revenaient à une saisie manuelle (comme sur une machine à
écrire) [Lévy 93] ;
4. La construction d’une représentation de la structure conceptuelle de la situation
correspond à la démarche de schématisation, ne retenant que des données pertinentes
(laconisme, cf. Ochanine) ; permet de se libérer (dans le sens le connaître suffisamment
pour jouer pleinement avec) du modèle mental ainsi construit.
Toutes ces remarques peuvent être résumées dans l’idée que l’acquisition de compétences
correspond à l’élargissement de son champ de réflexion et d’action, à la mise en oeuvre de
capacités de transfert, à conceptualiser et à abstraire.
Boucles d’apprentissage [Le Boterf]
Les retours des effets sur les actions comprennent des aspects acquisition/apprentissages, que ces
apprentissages soient explicites ou non. Les niveaux de modification changent :
15
« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
· Simple boucle : le sujet agit différemment mais sans changer fondamentalement ses
représentations ;
· Double boucle : le sujet modifie ses représentations pour agir autrement ;
· Apprentissage « deutero-learning » le sujet apprend à apprendre.
Les connaissances acquises par l’apprentissage pratique et par l’expérience sont directement liées
à cette notion de boucle. Cette voie d’acquisitions apporte essentiellement :
· Le positionnement dans une classe de problèmes, typologie (attribut de l’expert,
différence expert/novice) ;
· Un enrichissement, modification de cadres assimilateurs, assimilation-accomodation
(Piaget) ;
· La formalisation des processus et des procédures, permettant de formaliser et
d’expliciter les pratiques (dire ce que l’on fait).
On retrouvera ces notions de boucle et d’explicitation de pratiques comme l’une des spécificités
très importantes de la professionnalité enseignante et de l’acquisition des compétences de ce
métier (voir plus loin).
COMPETENCES DE L’ENSEIGNANT/FORMATEUR
Enseigner (ou former) n’est pas un métier comme un autre, dans lequel il est demandé
d’accomplir une tâche de production, de transformation de matière, de conception de dispositifs
concrets ou abstraits. Il s’agit ici de transmettre des connaissances (au sens large) dans une
situation collective d’interaction humaine, généralement complexe.
Perrenoud définit ainsi la professionnalité de l’enseignant comme « processus interpersonnel et
intentionnel qui utilise la communication verbale comme moyen pour faire réussir l’apprentissage
dans une situation donnée » [Altet in Paquay, Altet & coll. 98].
C’est pourquoi spécifier les compétences des enseignants (ou formateurs) nécessite des approches
originales par rapport à la problématique posée dans le domaine du travail. Ces approches ont
donné lieu à des travaux auxquels nous nous référerons, dont ceux de Paquay, Altet & coll.
[Paquay, Altet & coll. 98] qui posent d’abord le problème de la nature de la compétence
professionnelle mise en oeuvre par un enseignant-expert, puis s’interrogent sur l’acquisition de
ces compétences et se questionnent enfin sur l’organisation de l’acquisition de ces compétences
professionnelles.
La professionnalisation (en général)
Le processus de professionnalisation, c’est le « passage du métier artisanal où l’on applique des
techniques et des règles vers la profession où l’on construit ses stratégies en s’appuyant sur des
savoirs rationnels et en développant son expertise de l’action en situation professionnelle ainsi
que son autonomie » [Altet in Paquay, Altet & coll. 98] ; la professionnalisation se présente ainsi
comme une rationalisation des savoirs mis en oeuvre et des pratiques efficaces en situation. Ce
modèle de la professionnalité est jugé applicable aux enseignants.
16
« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
Cette définition nous paraît intéressante pour notre questionnement sur les TIC (voir le §
correspondant).
Altet distingue quatre modèles de professionnalités enseignantes :
· Magister ou Mage : modèle intellectualiste de l’Antiquité, le Maître qui sait, qui
possède des compétences rhétoriques ;
· L’enseignant technicien : dans les Ecoles Normales, enseignement imitatif,
compétences techniques ;
· L’enseignant ingénieur, technologue : s’appuie sur les apports scientifiques des
sciences humaines, rationalise sa pratique par l’application de la théorie ;
· L’enseignant professionnel, praticien réfléchi : va-et-vient pratique-théorie-pratique,
analyse de ses propres pratiques, apport des praticiens et des chercheurs.
Ce dernier modèle, le plus élaboré, semble le plus prometteur dans la perspective du chercheur ;
c’est le plus proche du modèle du « praticien réflexif » (Schon) cité par tous les auteurs
rencontrés dans [Paquay, Altet & coll. 98].
La professionnalité de l’enseignant : spécificité
« L’enseignant-professionnel est une personne autonome dotée de compétences spécifiques,
spécialisées qui reposent sur une base de savoirs rationnels, reconnus, venant de la science,
légitimés par l’Université ou de savoirs explicités issus des pratiques » [Paquay, Altet & coll. 98].
La première spécificité, c’est l’aspect interactif, l’adaptation aux particularités des situations. Le
pôle relationnel est au moins aussi important que le pôle savoir. D’où le schéma quadripolaire :
élève – enseignant – savoir – communication [Altet in Paquay, Altet & coll. 98].
Cet auteur relève une deuxième spécificité des tâches d’enseignement, l’existence de deux
champs de pratiques interdépendantes :
· La gestion de l’information, structuration du savoir par l’enseignant et leur
appropriation par l’élève : domaine de la didactique ;
· Le traitement de la transformation de l’information transmise en savoir chez l’élève par
la pratique relationnelle et les actions de l’enseignant : domaine de la pédagogie.
L’articulation de ces deux champs est fonctionnelle dans l’action.
Compétences et savoirs de l’enseignant-professionnel
La question qui se pose est celle de la spécificité des compétences et des ressources mobilisables
pour les mettre en oeuvre dans le cadre des activités de l’enseignant-professionnel, par rapport
aux compétences et ressources des activités professionnelles plus générales (Le Boterf).
Charlier [Paquay, Altet & coll. 98] situe les compétences dans le triptyque indissociable projets
(de l’action de l’enseignant) – actes (conduites dans la classe en situation) – compétences.
Les compétences proprement dites sont à l’articulation de trois registres de variables : savoirs,
schèmes d’action, répertoire de conduites et routines disponibles. Il est intéressant de relever les
17
« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
précisions apportées dans le cadre de la professionnalité de l’enseignant (par rapport aux
définitions des ressources confrontées plus haut).
Les savoirs
Les savoirs se combinent chez l’individu dans des représentations et des théories personnelles qui
sont réinvesties dans l’action.
Cette importance donnée à l’action en situation (dans la classe) est l’une des grandes constantes
de la professionnalité de l’enseignant.
Altet complète ainsi sa typologie des savoirs [Altet in Paquay, Altet & coll. 98] :
· Savoirs théoriques : déclaratif, savoirs à enseigner (disciplinaires) constitués,
extérieurs, savoirs pour enseigner, pédagogiques sur la gestion en classe ; à relier à la
distinction didactique/pédagogie ;
· Savoirs pratiques contextualisés, acquis en situation de travail, savoirs d’expérience ;
savoirs sur la pratique, sur le comment faire, savoirs procéduraux, savoirs de la
pratique ;
· Savoirs d’intégration : adaptation à la situation ; savoirs intermédiaires, savoirs-outils.
L’auteur se pose ici la question de la nature des relations entre savoirs et action dans le travail
professionnel de l’enseignant : sont-ce des savoirs sur l’action ? des savoirs d’action ? des savoirs
en action ?
Les schèmes
Pour mobiliser ces savoirs :
Les schèmes d’action : Perrenoud [Perrenoud 98 in Paquay, Altet & coll. 98] les caractérise en
schèmes de perception, d’évaluation et de décision, leur permettant de mobiliser et d’actualiser
les savoirs et de les transformer en compétences.
Répertoire de conduites disponibles
Ce qui est caractéristique, c’est peut-être que la mise en oeuvre de conduites plus ou moins
automatisées (routinisées) par les schèmes d’action permet d’agir sur le terrain, « de traduire en
actes des décisions prises lors de la phase de planification » [Charlier in Paquay, Altet & coll.
98].
Là encore, c’est l’aspect adaptation à la situation concrète (de classe) qui est le plus
caractéristique.
Apprentissage – acquisition des compétences
Dans une approche constructiviste [Charlier in Paquay, Altet & coll. 98], apprendre consiste à
modifier des schèmes à partir des interactions avec l’environnement. Les éléments antérieurs sont
importants : « Importance de créer, en formation et sur le lieu de travail, des conditions qui
permettent à l’enseignant de développer ses compétences professionnelles à partir de, par et pour
la pratique » :
18
« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
· à partir de la pratique : c’est le point de départ et support de réflexion
· par la pratique : acteur qui agit sur les caractéristiques de la situation, expérimente et
découvre des solutions
· pour la pratique : l’enseignant valorise les apprentissages dont il voit des retombées
positives. »
Cet ensemble de réflexions est intéressant et important pour nous : dans quelle mesure les TIC
permettent un cheminement analogue ? (Voir le § TIC).
Le fonctionnement de l’expert peut se caractériser par une combinaison de schèmes d’action
construits par l’expérience ; d’où la nécessité, pour la formation, de l’action et de la réflexion sur
celle-ci. Cependant « l’alternance à mettre en place n’est pas celle de la théorie et de la pratique
mais celle de l’essai et de l’analyse » [Faingold in Paquay, Altet & coll. 98].
Perrenoud [Perrenoud in Paquay, Altet & coll. 98] insiste sur une démarche de formation
délibérée de l’habitus professionnel, en tant que généralisation des schèmes. Il nous semble
intéressant de poser la question de l’intégration des TIC dans un habitus (voir § TIC).
Conclusion sur les spécificités de la professionnalité de l’enseignant
En conclusion, on retiendra comme spécificités les plus caractéristiques des compétences des
enseignants-professionnels :
· La complémentarité du travail hors terrain (avant) pour planifier l’action, sur le terrain
(pendant) et hors terrain (après) pour analyser et modifier ses actions ;
· Le fait que la situation d’action comporte de nombreux aléas à gérer en « temps réel »
(devant les élèves), et donc
· Le rôle attribué à cette situation d’action, comme lieu irremplaçable de formation des
compétences et d’exercice réel de celles-ci.
Une question que nous pouvons poser concernant l’intégration des TIC dans la professionnalité
de l’enseignant est celle de la part de formation aux TIC (et à l’usage des TIC) extérieure à la
pratique en situation et la part intégrée à la pratique en situation. Il semble qu’il y ait de toute
manière une formation aux usages des TIC préalable à toute mise en situation. Mais la limite
n’est pas évidente. Nous pourrions y réfléchir. Nous introduisons ainsi le paragraphe suivant.
COMPETENCES TIC
Cette section vise à tirer de ce qui précède un certain nombre d’hypothèses et de questions
auxquelles nous souhaiterions que l’ensemble de la recherche coopérative réponde.
Y a-t-il des compétences TIC dans l’absolu (hors des utilisations particulières) ?
C’est une référence à la question des compétences techniques liées une classe d’instruments
(texte Baron, Bruillard, Harrari du 14/09/99).
Peut-on spécifier des compétences proprement informatiques, qui ne ressortent pas de simples
« modes opératoires » ? Par exemple des capacités à gérer rationnellement les objets dans un
19
« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
système d’exploitation, utiliser de manière rationnelle (sinon optimale) les fonctionnalités des
logiciels généraux (TDT, tableur) ? Savoir utiliser les outils de recherche avancée sur le Web,
exploiter de manière correcte les documents trouvés (« copier-coller » du web vers des
documents personnels, apprendre à construire des pages Web, etc. ?)
La question est ouverte. Il ne faut cependant pas perdre de vue que devant la grande diversité des
usages, il est intéressant de les définir dans des situations et des buts précis. A ce propos, il a déjà
été discuté de classification des usages des TIC en fonction des situations d’enseignement (cf.
tableau activités/situations proposé, en annexe du compte rendu du 13/09/99). Il semble toujours
intéressant d’essayer de le compléter, ne serait-ce que comme support de discussion.
Compétences avec les TIC
En élargissant le questionnement aux compétences avec les TIC, Belisle & Linard [Belisle
& Linard 96] distinguent (en formation professionnelle) des compétences nouvelles et des
compétences anciennes étendues à de nouveaux publics :
· Compétences nouvelles : qualifications pour les nouveaux métiers de la formation
(multimédia, FED, etc.) ; maîtrise pratique des TIC et de leur application raisonnée à la
formation ;
· Compétences anciennes : méta-compétences de haut niveau (réflexif global), exigées
auparavant de personnels très qualifiés (cadres) et demandés maintenant à tous les
utilisateurs (réels et potentiels) des TIC. Peut-on alors parler de « compétences TIC »
dans la mesure où ce sont des compétences beaucoup plus générales et que, à cause de
ce degré élevé de généralité, elles nécessitent l’utilisation des TIC ?
Ce problème se pose plutôt pour des activités professionnelles qui changent de niveau « de
compétences » par leur évolution. Dans la mesure où les enseignants se situent déjà à un haut
degré de professionnalité (formation universitaire, exercice autonome, cf. « le professionnel »
selon Mintzberg [Mintzberg 81]), la première hypothèse est davantage valide. En revanche,
concernant des apprenants d’autres niveaux, la deuxième hypothèse nous paraît très pertinente.
Transposition didactique et pratiques socio-techniques
La problématique des compétences NTIC doit prendre en compte un aspect historique du
développement de l’informatique, à savoir que l’on est passé d’un utilisateur – spécialiste
(enfermé dans son centre de calcul) à l’usager disposant de son micro-ordinateur chez lui, à
l’IUFM, dans la classe [Belisle & Linard 96]. En conséquence, il est plus difficile de s’appuyer
sur des pratiques socio-techniques de référence dans la mesure où l’usage de l’ordinateur n’est
plus directement lié à un métier déterminé. De la même manière, la transposition didactique
s’applique davantage à l’enseignement des disciplines qu’à la formation à l’usage d’instruments.
Un changement de modèle pédagogique global
Belisle & Linard [Belisle & Linard 96] notent les changements apprortés par les TIC dans la
relations entre outils TIC et méthodes, structures et objectifs de la formation. L’outil TIC replace
l’utilisateur apprenant dans le (au coeur du) dispositif de formation, sans résoudre ses difficultés,
plutôt en en rajoutant (celles liées aux TIC).
20
« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
Les facilités offertes par les TIC tendent à changer le modèle pédagogique, on quitte la tradition
magistrale centrée sur les contenus (modèle latin) pour un modèle anglo-saxon davantage centré
sur l’apprenant.
Aspects culturels
La place des TIC dans la culture technique en évolution, les représentations sociales des TIC par
les acteurs, les représentations de leur mise en oeuvre, la variété du discours évoluant entre « il
n’y a rien à apprendre » et « c’est très complexe » mériteraient d’être étudiés de plus près. Il
pourrait exister des liens entre ces jugements, les usages réels et les modes de diffusion des
matériels, par ex. le fait que l’on trouve maintenant dans les grandes surfaces des dispositifs
utilisables dans un cadre professionnel.
Compétences TIC et habitus
Quels schèmes relatifs aux TIC, quelle dimension culturelle des TIC appartiennent à l’habitus
aujourd’hui ? Si l’habitus « traduit notre capacité de fonctionner sans savoir » [Perrenoud 98],
encore faut-il que les TIC y soient quelque part incluses. Cette inclusion est-elle en train de se
faire « naturellement » ? Sinon, comment y aider ?
La construction des compétences TIC
Apprendre à utiliser les dispositifs
La construction (cognitive) des compétences relatives aux usages des NTIC présente des
spécificités à la fois générales et particulières à chaque famille d’usage. Nous n’avons pas trouvé
de travaux spécialisés dans ce domaine.
Même si ce volet n’est qu’un aspect de l’ensemble de la problématique « compétences » pour les
acteurs qui nous concernent le plus (enseignants et leurs formateurs en IUFM), il semble qu’il ne
soit pas à négliger parce que la mise en oeuvre des instruments TIC se pose encore en difficulté à
vaincre, sinon en véritable obstacle qui ne facilite pas leur intégration dans les activités de
formation.
Notion de genèse instrumentale [Rabardel 95]
Elle tente d’expliciter la construction des fonctions instrumentales par le sujet. Rabardel distingue
les usages prévus (par le concepteur de l’artefact) et les usages non prévus (catachrèses). Ces
derniers constitueraient des preuves d’une genèse instrumentale propre au sujet, qui construirait
alors des usages non prévus.
Instrumentation et instrumentalisation :
· Instrumentation : évolution des Schèmes d’Utilisation (SU) et Schèmes d’Action
Instrumentée (SAI), processus tourné vers le sujet lui-même (ex. : utilisation plus ou
moins élaborée du logiciel TDT pour produire un document structuré) ;
· Instrumentalisation : évolution des composantes artefacts, processus orienté vers
l’artefact. (ex. : modeler l’écran à son goût par le panneau de configuration). Le travail
21
« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
avec instrument soulève le problème de la transformation des SU en SAI, de
l’emboîtement des schèmes, et des classifications (dans le travail, dans les disciplines
scolaires).
Hypothèses sur les changements technologiques et leurs conséquences [Lévy 93 et 95]
Le contraste est important entre le matériel (l’ordinateur, objet mythique) et l’immatériel
(l’information). La matérialisation des objets informationnels et des opérations est peu observable
et spontanément incompréhensible (on ne « voit » rien et on ne comprend pas les mécanismes
d’action). Il y a confusion entre des éléments d’une chaîne de services (par exemple Internet,
« qui fournit quoi ? Quel service paye-t-on ») et la chaîne physique qui ne la recouvre pas
exactement (l’ordinateur, le modem, la transmission téléphonique, le serveur…).
Dans ce contexte, la difficulté de construire des représentations et des schèmes par des
raisonnements par analogie est grande : la source et la cible ne sont pas comparables : même si le
système Windows (et ses ancêtres) « représente » des objets en principe courants, tels que les
dossiers, les documents, les fenêtres, ils n’en ont pas vraiment les caractéristiques qui permettent
de comprendre directement par analogie les opérations par lesquelles on agit sur les objets.
Exemples les plus courants :
· Assimilation de la disparition du contenu d’une fenêtre à la perte du document ;
· Mauvaise compréhension des opérations copier – couper – coller ;
· Différents niveaux de communication entre logiciels, transferts d’objets de différents
types, surtout en multimédia (format des fichiers images et sons…).
L’anticipation des effets à partir des actions, mécanisme de construction des schèmes, n’est pas
toujours possible parce que les observables ne sont pas évidents à percevoir (signes discrets sur
l’écran, par exemple différentes couleurs et graphismes de remplissage des icônes fichiers
caractérisant des propriétés différentes).
Notion de professionnalisation
Cette hypothèse sur le passage du stade « artisanal » au stade « professionnel » nécessitant une
formalisation, une approche rationnelle (voir ci-dessus) paraît importante parce qu’il semblerait
que, concernant les usages actuels des TIC , nous soyons dans une phase que l’on peut qualifier
d’artisanale (et de laquelle nous ne sommes pas encore sortis), qui est l’application tâtonnante de
techniques et de règles (mal fixées, pas encore formalisées) et nous n’allons pas encore
directement vers des constructions stratégiques, puisqu’il n’existe pas encore de savoirs bien
rationnels concernant les applications, ni de recul pour ces activités… Or la spécification de
compétences ne semble pouvoir s’effectuer que dans le cadre d’activités bien stabilisées.
Comment avancer à la fois vers une professionnalisation et vers une définition des compétences
dans les usages des TIC ?
Rôle de la pratique dans l’acquisition des compétences :
En reprenant les points listés à propos de l’acquisition et du développement des compétences en
relation avec la pratique [Charlier in Paquay, Altet & coll. 98], on note les spécificités des usages
des TIC :
22
« Etat de l’art » sur la notion de compétence J.F. Lévy INRP
· À partir de la pratique : cela suppose que les enseignants aient réfléchi au préalable aux
usages potentiels des TIC en situation, qu’ils sachent en quoi les TIC peuvent leur être
concrètement utile, ce qui nécessite une information/formation et une réflexion sur les
potentialités des TIC.
· Par la pratique : cela nécessite une bonne maîtrise de l’instrument pour pouvoir
expérimenter avec lui, c’est-à-dire que l’enseignant se soit au préalable formé aux
instruments et avec les instruments. En général, ce qui rebute les enseignants, c’est un
certain manque de pratique sur les instruments, qui conduit à la peur de ne pas maîtriser
assez la situation (technique et par conséquent pédagogique), peur que les élèves « en
sachent davantage qu’eux dans la manipulation de l’ordinateur » et que les enseignants
perdent ainsi le contrôle des opérations sur le terrain.
· Pour la pratique : la valorisation ne peut se faire que si les 2 points précédents sont
résolus.
Modes d’acquisition spécifiques
Melyani [Melyani 96] a observé plusieurs comportements d’autoformation en informatique
relevant du « compagnonnage » et du « bricolage », dont les principaux points communs en sont
l’aspect informel (tâtonnements, faire avec ce qu’on a – ce qu’on sait), l’entraide entre pairs , la
constitution de réseaux d’échanges, la lecture de revues spécialisées, etc. (la communication par
le web, maintenant). Ces modes d’acquisition sortant tous du cadre institutionnel, que peut-on en
espérer en formation organisée (de type IUFM) ? Ne va-t-elle pas continuer à concerner
seulement les « passionnés », les « bidouilleurs » en excluant les autres (le plus grand nombre) ?
EN GUISE DE CONCLUSION : UN DOMAINE A APPROFONDIR…
La notion de compétence (en général) semble caractériser des activités fortement
professionnalisées, donc relativement formalisées. Quand on passe aux activités
d’enseignement/formation, il en va déjà autrement : « si l’on savait dire exactement en quoi
consiste le métier d’enseignant, on pourrait sans détour s’intéresser aux compétences qui le soustendent
» [conclusion de Paquay, Altet & coll. 98]. A fortiori, concernant les TIC, domaine en
pleine évolution, la caractérisation n’est pas évidente. Essayons cependant…
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terça-feira, 13 de maio de 2008
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